lundi 3 octobre 2016

«A la recherche du sens profond de la royauté» - une recension de «La royauté et le sacré»

Après Prendre soin de l’autre - Une vision chrétienne de la communication (Cerf, 2012), le même blog littéraire a publié une recension de mon ouvrage La royauté et le sacré (Cerf, 2016) avec des extraits. Merci à son auteur pour l'autorisation de la reproduction de cette recension avec les extraits choisis ci-dessous.

"Christophe Levalois nous propose ici un voyage à travers les époques et les continents, à la recherche du sens profond de la royauté. En s’appuyant sur les différentes traditions royales, mais aussi sur les légendes – ce folklore qui en dit tellement long, il met en évidence l’universalité de la fonction, et nous permet ainsi de saisir l’importance capitale du roi – et de sa mission – dans une société. Il est en effet le centre, celui qui représente sur terre le Roi céleste, que l’on appelle aussi le Roi des rois dans les Écritures, et qui pourrait être la promesse d’un pouvoir éclairé, transcendant, car inspiré directement de Dieu. En véritable explorateur, et avec érudition, l’auteur nous invite à (re)découvrir ces terres d’asiles trop longtemps oubliées – et fustigées – que sont les royautés… pour notre plus grande perte. Un ouvrage remarquable !"



  •  « Pour terminer sur le terme sacré, j’ajouterai, en conformité avec le christianisme, que nous sommes tous appelés à œuvrer à la transfiguration du monde, c’est-à-dire de la totalité de la Création, et pas seulement d’une partie de celle-ci. De même que la chute initiale rejailli sur la Création (« Le sol sera maudit à cause de toi » Genèse 3,17), et sur notre relation à celle-ci, la transfiguration, mouvement ascendant contraire, concerne non seulement la personne, mais aussi l’ensemble de la Création, donc également ce que l’on désigne souvent comme étant profane. Finalement, le monde n’est pas profane, mais, par contre, très souvent profané. Dans le christianisme, face à cette pesanteur et à cet assombrissement, l’être humain qui se relève vers son Créateur, reçoit selon sa mesure, la sainteté grâce à celui qui en est la source, en allant de l’image divine, qu’il découvre alors en lui, à la ressemblance de son Créateur à laquelle il est destiné. » p. 9-10
  • « Car si celui qui sert de guide et de modèle dévie, alors l’ensemble de la communauté se fourvoie et se perd, à terme disparaît. » p. 15
  • « Tout d’abord, le centre est principe et origine. […] En conséquence, le centre se signale par sa générosité. » p. 18
  • « La tradition scandinave, dans un texte nommé Rigsthula (Chant de Rig), étudié en détail par Georges Dumézil, rapporte la constitution des trois fonctions (tripartition sociale) par le dieu Rig, autre nom du dieu Heimdall, dieu associé à la lumière et au feu qui garde le pont arc-en-ciel Bilfröst à la fois lien et interface entre le monde des hommes (Midgard) et le monde des dieux (Asgard). […] Dans ce poème, dont nous possédons une version incomplète de quarante-huit strophes, Rig voyage de par le monde. De ces pérégrinations naissent plusieurs enfants, chacun étant l’archétype d’une fonction : Thraell, l’esclave, Karl, l’homme libre et le paysan, Jarl, le seigneur. » p. 33
  • « Durant les périodes de renouvellement, le monde retourne à l’origine, s’y régénère, et s’y reconstruit. C’est pourquoi, dans les sociétés traditionnelles, le roi, considéré comme étant le père du peuple, incarne l’unité de la société mais aussi inaugure et impulse tout nouveau cycle. » p. 38  
  • « Le centre est aussi l’ultime refuge. Si tout commence, et recommence, à partir de lui, toute contraction finale qui marque la fin ultime d’un cycle ramène au centre. » p. 40
  • « La force novatrice qui se répandait alors et régénérait tant la société que le monde était nommée vertu, terme qui doit être compris d’après son sens étymologique latin, à savoir « valeur », « fermeté », « force », entendu comme étant une qualité tournée vers l’action pour le bien et provenant du mot vir, « homme ». »  p. 43
  • « Ainsi que nous l’avons souligné, le centre demeure inébranlable, caractéristique de sa nature polaire. » p. 49
  •  « Est juste ce qui va droit, c’est-à-dire ce qui se dirige vers la lumière divine. La justice permet à la lumière d’en-haut de triompher ici-bas des ténèbres. »  p. 53
  •  « A cet égard il ne faut pas oublier que notre monde est un lieu de passage et de luttes continuelles, le « monde du mélange » disent les mazdéens. Le roi représente le monde d’en haut. Il doit contenir et repousser les forces dissolvantes du monde infernal – du latin infernus, « en dessous, région inférieure » – et établir, autant que possible, un royaume qui soit le reflet du royaume céleste afin de permettre à ses sujets d’y parvenir au terme du voyage post-mortem. »  p. 55-56
  • « Nous avons vu que le roi intègre en lui toutes les fonctions. Par conséquent, il est également prêtre. » p. 64
  • « Une société traditionnelle se caractérise par son entière orientation vers le haut, le monde spirituel, qui structure sa vie, son organisation et son développement. Il n’y a pas d’activité profane, c’est-à-dire d’activité non tournée vers le supra-monde, dénuée d’un sens supérieur à notre monde passager. » p. 66
  • « Le prêtre, dans les sociétés traditionnelles, est avant tout un « technicien » des rites et des sacrifices. Il doit connaître les paroles, les gestes, les actes nécessaires à l’accomplissement de ceux-ci. » p.73
  • « Le cheminement qui mène à l’affirmation de la supériorité du sacerdoce sur la royauté commence par une distinction, parfaitement traditionnelle, entre l’esprit et la matière. On en déduit, fort logiquement, que l’esprit doit dominer et modeler la matière. L’innovation intervient lorsqu’il est affirmé, ou sous-entendu, que le sacerdoce représente l’esprit et le roi le monde matériel. Ainsi est justifiée la domination de l’un sur l’autre. » p. 75
  • « Sans roi, le monde n’a plus de centre et plus de rempart contre les puissances infernales. En effet, sans tête, et sans les relations avec le monde céleste que la tête permet, les hommes ne voient plus, n’entendent plus, n’agissent plus et s’égarent, ils deviennent alors en somme « des aveugles qui guident des aveugles » (Matthieu 15,14). […] Ce combat donne son véritable sens à l’existence humaine et révèle l’essence de la mission royale, « sur la Terre comme au Ciel ». Il réunit dans une même orientation et une même énergie le monde visible et l’invisible, le microcosme et le macrocosme. Le roi qui durant son règne mène à bien cette lutte difficile et périlleuse ne fait qu’un avec le Souverain céleste. » p. 111