Le rôle oecuménique de l'Institut Saint-Serge
Le père
Serge Boulgakov (1871-1944) fut le premier doyen de l'Institut de théologie orthodoxe Saint-Serge à Paris, lequel fut fondé en 1925. L'Institut Saint-Serge joua
un grand rôle oecuménique, notamment durant l'entre-deux-guerres. Le père Serge Boulgakov s'est ainsi impliqué dans la fondation et l'essor de la
Fraternité Saint-Alban et Saint-Serge au Royaume-Uni, dédiée à la rencontre des anglicans et des orthodoxes, dont le père
Lev Gillet s'est occupé par la suite. Il alla aux États-Unis et au Canada et noua d'importants contacts avec l’Église épiscopalienne. Le père
Alexis Kniazeff, qui fut recteur de l'Institut Saint-Serge de 1965 à 1991, a écrit (
L'Institut Saint-Serge - De l'académie d'autrefois au rayonnement aujourd'hui, Beauchesne, 1974, p. 50) : "Les délégués de l'Institut Saint-Serge purent aussi participer aux deux grandes conférences œcuméniques des années trente. Elles étaient tenues respectivement par les deux grands mouvements Life and Work et Faith and Order, de la réunion desquels après la Seconde Guerre mondiale naquit le Conseil oecuménique des Églises."
L'aide de protestants américains et de grandes organisations internationales
Enfin, il n'est pas inutile de rappeler, dans l'autre sens, le rôle important joué par des protestants et des organisations protestantes dans l'aide et le soutien d'organisations orthodoxes russes comme l'
Acer et
Ymca-press (en anglais:
1 et
2). Ce fut aussi le cas pour l'Institut Saint-Serge qui reçut pour sa fondation un important soutien financier de la part d'une éminente personnalité méthodiste, l'américain
John Raleigh Mott qui fit une donation de 8000 dollars pour l'achat des lieux (Cf.
L'Institut de théologie orthodoxe Saint-Serge - 70 ans de théologie orthodoxe à Paris, Hervas, 1997). John R. Mott fut notamment le fondateur, secrétaire général, puis président de la
Fédération universelle des associations chrétiennes d'étudiants (
FUACE). Il a reçu le prix Nobel de la paix en 1946. Il fut l'un des pionniers du mouvement oecuménique au XXe siècle,
élu en 1948 président honoraire à vie du Conseil oecuménique des Églises en raison de son grand rôle dans la genèse de cet organisme. Il fut l'ami du saint patriarche
Tikhon de Moscou, qu'il a connu en Amérique (
Ibid., p.6). C'est en 1922, à Prague, que l'homme politique et académicien
Pierre B. Struve, le professeur et ancien ministre
Anton V. Kartachev et le père
Georges Chavelsky, ancien aumônier général des armées russes, lui présentèrent l'idée de la création d'une école supérieure de théologie orthodoxe en Europe à laquelle il apporta son soutien et celui de la FUACE (
Ibid., p.5-6). La même idée avait été émise la même année à Pékin, lors d'une conférence de la FUACE, par Léon A. Zander, par la suite professeur à l'Institut Saint-Serge, et d'autres personnes, et à Berlin par le philosophe
Nicolas Berdiaev ainsi que des universitaires et des théologiens (Alexis Kniazeff, p.42-43). Étant donné qu'en 1922, le
métropolite Euloge (Guéorguievski) installa le siège de son diocèse, regroupant les paroisses orthodoxes russes d'Europe occidentale, à Paris, c'est dans la capitale française qu'il fut décidé de créer cette école. D'autres protestants aidèrent également à cette fondation, comme
Paul B. Anderson et
Donald Alexander Lowrie, tous deux ayant de hautes responsabilités au sein des
YMCA (présents en Russie
à partir du début du XXe siècle, pour approfondir ce sujet:
The American YMCA and Russian Culture de
Matthew Lee Miller, 2012; d'Antoine Arjakovsky,
La génération des penseurs religieux de l'émigration russe, L'Esprit et la Lettre, 2002), ce soutien
ne s'est pas démenti après la Seconde Guerre mondiale, ainsi qu'un philanthrope israélite, Moisei Akimovich Ginsburg, qui a consenti un prêt au métropolite Euloge "sans intérêts et sans prise de garantie" (Alexis Kniazeff, p. 41). D'autre part, les dons affluèrent aussi bien des milieux orthodoxes que des milieux œcuméniques (
Ibid.).